La gamification, c’est quoi ?
Peut-être que vous avez déjà entendu parler de ce concept, ou que vous avez lu quelques lignes sur le Net. Mais pour que tout le monde soit sur la même longueur d’onde, voici une petite définition :
La gamification, c’est l’art d’utiliser les principes et les mécaniques du jeu vidéo dans des contextes non ludiques. C’est une tendance qui se développe de plus en plus dans différents domaines, comme l’éducation, le marketing, la santé ou le management. Le but de la gamification, c’est de stimuler la motivation, l’engagement, l’apprentissage et la performance des individus, en leur proposant des défis, des récompenses, des feedbacks, des niveaux de difficulté adaptés.
Dans quel contexte l’utiliser ?
Plus concrètement, je vais vous parler de deux jeux vidéo que j’utilise dans mon cours de méthode de travail à raison de deux fois quatre périodes. L’objectif de ces séances est de développer principalement les compétences transversales de collaboration et de communication et, dans une moindre mesure, la gestion des priorités et l’adaptabilité.
Si vous ne savez pas ce qu’est une compétence transversale, sachez que ce sont des compétences essentielles pour réussir dans le monde professionnel mais aussi dans la vie personnelle et sociale. Elles permettent de travailler en équipe, de gérer des situations complexes, de s’adapter à des changements, etc. De plus, ce sont des compétences qui ne nécessitent aucune connaissance dans un domaine particulier.
Quels sont les jeux choisis ?
Parmi les jeux vidéo qui peuvent servir de support à la gamification, il y a notamment « Overcooked » et « Keep Talking and Nobody Explodes ». Ce sont deux jeux coopératifs qui mettent en scène des situations stressantes et qui exigent une bonne communication et une bonne collaboration entre les joueurs. Ces jeux ne nécessitent pas d’ordinateurs surpuissants et sont très accessibles financièrement (une dizaine d’euros). Vous pouvez les trouver sur une plateforme en ligne, dont je vous mets les liens ci-dessous, ainsi que des courtes vidéos qui les présentent.
Overcooked
Overcooked est un jeu de simulation culinaire, dans lequel les joueurs doivent préparer des plats dans des cuisines chaotiques, en respectant les commandes, les ingrédients, les temps de cuisson, etc. Le jeu propose des niveaux de plus en plus complexes, avec des obstacles, des contraintes de temps, des changements de décor, etc. Les joueurs doivent donc s’organiser, se répartir les tâches, se coordonner, s’entraider, et faire preuve de créativité et de réactivité pour réussir les objectifs.
https://store.steampowered.com/app/448510/Overcooked/
(🔐2 = ⬇️)
Keep Talking and Nobody Explodes
Keep Talking and Nobody Explodes, c’est un jeu de désamorçage de bombes, dans lequel un joueur doit manipuler une bombe virtuelle, tandis que les autres joueurs doivent lui donner des instructions à partir d’un manuel de désamorçage. Le jeu implique une communication verbale claire et précise, une écoute active, une confiance mutuelle, une analyse des informations, une résolution de problèmes, etc.
https://store.steampowered.com/app/341800/Keep_Talking_and_Nobody_Explodes/
OK mais qu’est-ce que ça va leur apporter à mes étudiants ?
La gamification (dans le contexte du jeux vidéo) et appliqué à l’apprentissage, offre un grand nombre d’avantages pour les apprenants. Cela permet entre autres de :
- Renforcer la motivation et l’engagement, en créant du plaisir, du défi, de la compétition, de la coopération, de la reconnaissance;
- Favoriser l’apprentissage, en stimulant la mémoire, l’attention, la concentration, la réflexion, la créativité;
- Améliorer la performance, en augmentant la confiance en soi, l’autonomie, la responsabilité, la persévérance;
- Développer des compétences transversales, en sollicitant des aptitudes cognitives, sociales, émotionnelles et comportementales.
Mais attention, intégrer des jeux vidéo dans un cours, ça ne se fait pas comme ça. Jouer pour jouer, n’est pas un but suffisant. Et donc la gamification (avec les jeux vidéo) a aussi ses limites et ses précautions à prendre en compte.
Il faut notamment :
- Choisir des jeux adaptés aux objectifs pédagogiques, au public cible, au contexte d’utilisation;
- Encadrer l’activité ludique en définissant les règles, les rôles, les consignes, les critères d’évaluation;
- Accompagner les apprenants en les guidant, les soutenant, les encourageant, les félicitant;
- Assurer un suivi et un feedback en analysant les résultats, les progrès, les difficultés, les points forts, les points faibles.
Et donc ? Concrètement, ça donne quoi ?
Ah, voilà une bonne question. Vous trouverez ci-dessous un déroulé d’activité de cours pour les deux exemples proposés. Après cette lecture, et si vous n’êtes toujours pas convaincu, essayez-le avec vos étudiants, vous serez surpris…
Pour Keep Talking And Nobody Explodes.
Au début du cours, j’explique rapidement le sujet du jour. J’introduis le contexte auprès des étudiants : ils seront des « démineurs ». Pour ça, ils auront besoin des consignes papier (fournies en français) et du jeu en question. Je lance alors le jeu en vous donnant quelques éléments supplémentaires (le temps limité, le nombre d’erreurs maximum, etc.) et je présente les touches qui permettent de manipuler la bombe.
Je demande alors à deux premiers volontaires de venir au tableau. Un aux consignes de déminage (qui ne verra pas l’écran) et l’autre à l’ordinateur. L’ordinateur en question projette en classe l’image du jeu lancé pour que tout le monde suive l’action en direct. Les parties durent en moyenne trois, quatre minutes.
Je demande aux étudiants qui ne sont pas au tableau de ne rien dire pour ne pas influencer ce qui se passe. Je laisse quelques minutes aux premiers étudiants pour se familiariser avec les feuilles et l’ordinateur. Quand ils sont prêts, sans avoir donné plus d’explications, je lance le décompte et la partie commence !
Ce qui va se passer : Ça va être le bazar, les étudiants vont sûrement communiquer de manière erratique, lire les mauvaises pages, donner les mauvaises infos, bref, ils vont se planter et faire sauter la bombe. Et c’est normal.
C’est important que ces premiers volontaires ne se sentent pas frustrés. Je vais mettre en avant les quelques éléments positifs que j’ai identifiés avec eux en précisant que ce sont toujours les premiers qui ont le rôle le plus compliqué.
Vous allez, sans donner trop d’éléments de réponse, appeler deux autres volontaires qui vont essayer de faire mieux. Après leur partie, vous allez maintenant demander aux autres étudiants ce qu’ils ont fait de différent par rapport aux premiers. Vous allez identifier avec eux des bases de préparation, de communication, de collaboration et de gestion du temps.
Les troisièmes à venir auront alors bénéficié des apprentissages des deux premiers groupes. Vous pouvez alors répéter l’opération autant de fois que nécessaire en identifiant et en notant (et en affichant) les éléments qui ont été utilisés par les étudiants et qui permettent d’améliorer le résultat.
Quand vous jugerez que le moment est venu (5/6 groupes passés en moyenne et en fonction de la taille de vos classes) vous pourrez alors reprendre la liste des choses importantes identifiées et demander aux étudiants dans quels contextes scolaires ces points pourraient également être travaillés et rendus favorables à un meilleur déroulement.
Les réponses attendues sont évidemment les travaux de groupes, les stages mais également les feedbacks échangés avec les relecteurs de TFE, les correcteurs, etc.
Une fois cette logique adoptée, je pourrai plus tard dans l’année aborder le deuxième jeu vidéo « Overcooked » et proposer de venir au tableau les éventuels absents/déçus lors du premier jeu. Dans ce jeu-là, le principe est le même, je donnerai peu d’info sur le jeu en lui-même, l’apprentissage donnant l’occasion d’une organisation forcée de la part des étudiants. Sur le même modèle, j’aurai alors la possibilité de demander un retour aux étudiants qui ont observé la partie et leur demander d’améliorer le résultat des précédents.
Les parties ici se déroulent à 2 sur ordinateur et jusqu’à 4 si vous avez une manette. Ces parties durent 5 minutes et ne consomment donc pas trop de temps de cours tout en gardant le reste des apprenants observateurs assez attentifs, voire actifs.
Outre l’ambiance de folie qui va se dégager de ces exercices, je pourrai alors remarquer que lors de la deuxième session, mes étudiants vont tout doucement anticiper les choses et développer des stratégies originales. Mais, pour ne pas vous gâcher le plaisir, je ne vais pas vous les énumérer ici…
En conclusion
Si l’aventure vous tente, que vous voulez essayer un support atypique, travailler des compétences nécessaires dans tous les éléments de la vie de l’étudiant, que vous êtes curieux et que vous ne voulez pas « risquer » quelque chose de trop gros ou trop dur à gérer. Je ne peux que vous conseiller d’intégrer ce que vous avez découvert dans cet article.
Comme souvent, si vous avez la moindre question, Technopédia est là pour vous répondre.
Voulez-vous en savoir plus ?
Si le sujet vous parle et que vous voulez en apprendre plus et ce de manière plus détaillée, je ne saurais que vous conseiller les lectures suivantes :
- La superbe expérience de Gaël Gilson via son site : https://luduminvaders.com/category/le-jeu-video-en-classe/
- Le travail de recherche de Jonathan Mina et Pascale Warmoes via le site : https://eductive.ca/ressource/jeux-videos-en-classe-apprentissage-significatif-appuye-par-la-recherche/
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